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« Je vais être en retard ! » grommelai-je. Je tente vainement de me frayer un chemin entre les passants de l’avenue de la Motte, bondée par des troupeaux de touristes niais et égarés. Promptes à dégainer leur appareil photo, ils empiètent toute la largeur de la rue, rendant/contrariant ma course saccadée/inconstante/désagréable/inégale.

C’est ça le problème des grandes villes. Je me plais à vivre ici, on ne s’ennuie pas mais cette invasion estivale m’oppresse.

L’obstacle franchit, je bifurque enfin dans la rue Monet où j’entre dans le cabinet du Dr Rocambole. La secrétaire m’accueille et m’invite à m’installer dans la salle d’attente. Quelques minutes avant que le docteur m’interpelle, j’eus le temps de reprendre mon souffle et de calmer mon angoisse.

J’entre, la boule au ventre et m’installe dans le fauteuil qui doit surement m’être destiné.

« -Calmez-vous Mademoiselle, je ne vais pas vous manger ! Plaisanta-t-il.

-Je suis désolée, c’est juste que je n’ai pas l’habitude de me dévoiler…

-Ne vous en faites pas, tout restera dans ce cabinet.

-Bien. Mais… vous allez me prendre pour une folle. Bégayai-je

-Impossible ! Si vous saviez tout ce que j’ai pu entendre.

-Même si je vous dis que j’ai la certitude d’avoir vécu plusieurs vies et à différentes époques ?

-Qu’est-ce qui vous fait dire ça ?

-Chaque nuit je rêve d’un homme que j’aime, enfin, je crois l’aimer. Ce sont toujours des scènes joyeuses. Mais je suis vêtue de vieux haillons, courant dans la boue ou me baladant sur des remparts. Puis, d’un coup arrive le noir, le froid, je me sens seule et terrorisée. Et j’entends le même homme, je ne le vois pas mais j’entends cette même voix rauque qui me supplie de revenir. Il est partagé entre la fureur et une peur assourdissante. Et cette odeur aussi, une odeur de mort, de maladies et d’expériences, comme dans les hôpitaux. Enfin, je me réveille avec la sensation du feu qui embrase lentement mes bras.

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