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« Je vous préviens, ça ne sera pas facile à entendre. Tout commença quand nous nous sommes rencontrés il y a maintenant un bon nombre d’années, tu étais si ravissante Candice, à la fois frêle et sûre de toi. Tu as toujours eu peur des charançons et toujours fait preuve d’un sentimentalisme exacerbé. C’est ce que j’aimais chez toi. »

La voyant perdue dans ses pensées, il s’interrompit. Il l’observait, la trouvait si belle. Ses petites mains tremblaient, ses quenottes claquaient légèrement car l’homme lui procurait de la peur. Elle aurait voulu tomber aux oubliettes et disparaitre.

« Vous dites donc que j’ai eu un accident, c’est bien cela ? » l’interrogea-t-elle.

Il la regarda un long moment avant de bégayer :

« Laisse-moi te raconter. C’était il y a deux ans lorsque nous avons été transbahutés dans un autre appartement de manière sauvage. Les huissiers étaient venus afin de nous reprendre l’appartement que nous avions laissé impayé. Nous avons été désentripaillés par cette nouvelle, nous n’avions plus rien, nous étions seuls. Tes parents n’avaient jamais accepté notre relation, les miens sont décédés lors d’un accident de moto. Nous avons donc été logés dans un petit deux pièces mais nous n’étions que deux, cela nous allait parfaitement.

- S’il vous plaît, allez à l’essentiel, aucun souvenir ne refait surface. »

Nathan s’arrêta, prit sa respiration et laissa une larme ruisseler le long de sa joue. Le paysage devint sombre, il ne savait plus s’il devait continuer ou abandonner son combat.

« Que vous arrive-t-il ? s’inquiéta Candice.

- S’il te plaît Candice, cesse de me vouvoyer, nous avons tant partagé, laisse-moi te raconter la suite. Près de notre appartement s’étendait un cours d’eau, tous les dimanches des pêcheurs y venaient. Tu voulais toujours y aller pour te promener sur les quais et les observer.

- Etes-vous sûr qu’il s’agit de moi ?

- Je ne peux en douter, crois-moi. »

La mine de la jeune femme sembla pâlir. Nathan tenta de la prendre dans ses bras mais elle eut un fort mouvement de recul.

« Tu ne te souviens plus de nos étreintes près des arbres, en bas de l’appartement ? Candice, fais un effort !

- Monsieur, votre histoire me semble montée de toute pièce.

- Mais non, Candice, c’est cet accident qui t’as fait oublier.

- Racontez-moi ce fichu accident, qu’on en finisse. »

Le visage en décomposition, elle ne savait plus quoi penser. Avait-elle vraiment tout oublié ou cet homme était-il un fabulateur ? Elle réfléchit un instant et arriva à la conclusion qu’il était un simple menteur, une femme ne pourrait pas oublier l’homme qu’elle aime. Mais que lui voulait-il alors ? Peut-être qu’il était simplement malade ou peut-être qu’il lui voulait du mal. Elle ne savait pas. Candice savait qu’elle avait eu un accident, les médecins le lui avaient dit, mais elle n’en avait aucun souvenir, ni de sa vie d’avant, tout avait été effacé. Elle sortit de sa rêverie en réinterrogeant l’homme.

« Vous voulez bien me le raconter cet accident ?

- Oui, s’il le faut… On s’était disputés ce jour-là, tu étais très énervée et moi aussi. Tu voulais que je quitte l’appartement, ce que j’ai refusé puis…

- Mais nous étions donc séparés ?

- Non, attends ; j’ai refusé puis tu as décidé que je dormirai sur le canapé. Le soir, la situation était à peine apaisée que nous avons reparlé d’un sujet sensible qui était les enfants. Tu es stérile Candice, tu ne pourras jamais avoir d’enfant, cela t’attristait beaucoup. Tu as décidé de sortir prendre l’air. Je te regardais par la fenêtre et au moment où ton regard a croisé le mien, une voiture t’a percutée. J’ai hurlé Candice, de toutes mes forces j’ai hurlé mais tu étais au milieu des voitures. Des bruits de klaxon résonnaient. J’ai rapidement entendu la sirène des pompiers. Je n’ai trouvé la force de descendre que quelques heures plus tard après de longues prières. La vie avait repris son cours en bas, je ne savais où tu étais. »

Horrifiée, la jeune femme avait le regard vide mais répliqua soudain :

« Pourquoi n’ai-je aucune séquelle ? »

Elle resta sans réponse, elle en était sûre cet homme lui voulait du mal, restait à savoir pourquoi.

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    Justine TARROU (UPEM - L1 Lettres Modernes - TD2)

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