Les Rocambolesques
roman-feuilleton collectif arborescent à contraintes
« Toi ! Bien sûr, je le savais, ça a toujours été toi, dit-elle d'une voix dans laquelle transparaissait une hystérie grandissante. J'ai beau me cacher, tu me retrouves à chaque fois...
- Tu es très douée pour disparaître, je l'admets, mais j'ai toujours été meilleur à ce jeu-là, tu devrais le savoir depuis le temps, répondit l'homme.
- Je t'ai dit que je ne voulais plus de cette vie ! sanglota-t-elle en serrant étroitement les pans de son manteau, comme pour se protéger.
- Tu m'appartiens Mélodie ! Oh, j'oubliais, tu veux que je t’appelle autrement maintenant, non ? Jane Stevens peut-être ? Ou Alicia Stormbrook ? Elizabeth Smith ? Ou ma préférée, Margaret de Montagne ?
- Arrête ! s'écria-t-elle d'une voix stridente.
- Quoi ? Tu as honte de tes fausses identités ? C'est pourtant toi qui les as choisies, il me semble.
- Tu me suis depuis combien de temps ?
- Depuis toujours voyons. À chaque minute de ta misérable vie, je sais où tu es. Je t'avais déjà donné un avertissement, il y a deux ans, en Ukraine ; mais tu ne m'as pas écouté.
- Je ne reviendrai pas !
- Tu crois vraiment avoir le choix ? Le Patriarche est patient, Mélodie, mais tu as dépassé les bornes. Une personne comme toi ne peut pas être une simple serveuse dans un bar minable de banlieue !
- C'est toujours mieux que ce que tu m'obligeais à faire avant !
- C'est faux, tu aimais ça, je le sais et tu le sais aussi. Tu étais faite pour ça, une vraie pro, tu aurais même pu me dépasser si tu n'avais pas fui comme une lâche.
- Je m'en fiche ! Dis au Patriarche que je ne reviendrai jamais, c'est clair ?
- Dis-lui toi-même, ma grande, répondit-il en ricanant sournoisement, il a eu l’extrême courtoisie de m'accompagner ce soir.
- Bonsoir, ma chère Mélodie, dit une autre voix, grave et profonde, qui provenait de derrière le mur aux cœurs. Cela faisait longtemps.
- Père ? couina la jeune femme.
- Pourquoi as-tu l'air si effrayé, ma chérie ? demanda le nouveau venu en sortant de derrière le mur.
- Que fais-tu ici ?
- Je viens te ramener à la maison, bien sûr, répondit l'homme en souriant chaleureusement.
- Je... Je ne veux pas. Je t'en supplie, laisse-moi partir.
- Certainement pas, fit le Patriarche toujours souriant, mais le regard aussi froid qu'une lame de poignard. Je ne ferai pas deux fois la même erreur.
- Il a déjà été trop gentil avec toi, Mélodie, dit l'autre homme.
- Toi, ferme-la ! rétorqua sèchement Mélodie avec rage.
- Surveille tes paroles quand tu parles à ton grand frère ! menaça le Patriarche d'une voix soudainement aussi glaciale que ses yeux. Il est de huit ans ton ainé, alors un peu de respect, jeune fille.
- J'ai toujours eu honte d'être un membre de cette famille !
- Oh, tu as enfin retrouvé ton courage ? se moqua son frère d'un ton narquois.
- Silence, Eddie, lança le Patriarche en s'adressant à son fils. Mélodie, tu vas revenir avec nous, que tu le veuilles ou non. La famille a besoin de toi... et de tes talents.
- La famille ? Tu veux dire la même "famille" qui m'a torturée pendant toute mon enfance ?
- Personne ne t'a torturée, nous t'avons entrainée pour que tu deviennes une personne d’exception.
- Je t'en prie, ne me sers pas ton baratin, ça marche peut-être avec ce crétin d'Eddie, mais pas avec moi !
- Surveille ton langage ! s'écria son frère en portant une main dans son veston.
- Pas assez rapide, grand frère, dit Mélodie en sortant un revolver de son manteau et en le pointant sur son frère.
- Je vois que tu n'as pas perdu tous tes réflexes, finalement, remarqua Eddie.
- Ça suffit tous les deux, cracha le Patriarche qui semblait plus ennuyé que choqué de cette situation. Et Mélodie, si tu avais été plus attentive, tu aurais remarqué que l'autre main de ton frère est dans sa poche et qu'il pointe son autre revolver sur toi depuis le début de votre discussion.
- Tu as encore beaucoup à apprendre, petite sœur.
- Assez discuté, il se fait tard. Mélodie, viens-tu avec nous de ton propre chef ou doit-on t'y obliger ?
- Je ne viendrai pas ! dit fermement la jeune femme, son revolver toujours levé.
- Nous sommes armés ma chérie, et une vingtaine de mes meilleurs hommes nous entoure. Et, en ce moment même, tu as un sniper prêt à tirer sur toi. J'ai juste à lever la main et il t’abattra comme un animal.
- Tu n’oserais tout de même pas tuer ta propre fille ?
- Bien sûr que non. C'est un fusil hypodermique, il contient un fort tranquillisant qui t'endormira pendant à peu près vingt-quatre heures.
- Pas si je tue ton sniper avant, s'écria la jeune femme en pointant son revolver et en tirant en direction du bois, qui se trouvait à proximité de là où ils étaient.
- Joli tir ! félicita son père en entendant un bruit sourd, celui d'une chute, au loin. Mais, je crois que je deviens un peu sénile, j’ai oublié que je n'ai pas qu'un sniper, mais plutôt deux.
- Quoi ? dit Mélodie avant de sentir quelque chose lui piquer le cou, l'obligeant à s'étaler inconsciente sur le sol.
- Ramasse-la Eddie, nous partons.
- Elle est un peu rouillée, mais elle est encore très douée.
- Ta sœur a toujours eu un don pour l'assassinat, mais, tu as raison, il faut qu'elle s'améliore encore. Une de nos petites épreuves devrait lui redonner le goût du métier... »
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Si vous êtes un adepte du chantage, allez en 2.3.O
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Si vous aimez les endroits lugubres, rendez-vous en 2.3.P
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Si vous aimez les petites guerres entre frères et soeurs, direction 2.3.Q
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Le 20 octobre 2016
Romane DOS SANTOS, Florent GRASSAUD, Kaoutar TALHA, Maéva GUIARD
(UPEM, L1 Lettres Modernes, TD2)